Niger: le président Issoufou affirme qu'un coup d'Etat a été déjoué

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Niger: le président Issoufou affirme qu'un coup d'Etat a été déjoué

RFI, 17 Dec 2015

URL: http://www.rfi.fr/afrique/20151217-niger-president-issoufou-annonce-coup-etat-dejoue-militaires
Au cours d'une allocution télévisée, le président nigérien Mahamdou Issoufou a affirmé jeudi soir qu'une tentative de coup d'Etat avait été déjouée au Niger. Cette annonce, à deux mois du scrutin présidentiel, intervient après l'arrestation de plusieurs hauts gradés en début de semaine.

L'objectif de ces individus était de renverser le pouvoir démocratiquement élu.

« Le gouvernement vient de déjouer une tentative malheureuse de déstabilisation des institutions. » Le président Mahamadou Issoufou l’a annoncé jeudi soir dans son discours à la nation prononcé à la télévision nationale à la veille du 57e anniversaire de la proclamation de la République : le Niger a déjoué une tentative de coup d’Etat.

« Les auteurs ont caché des armes », explique encore le président nigérien. Des armes qui étaient destinés aux soldats sur le front. « Ils envisageaient notamment d’utiliser la puissance de feu des moyens aériens qu’ils ont bloqué délibérément depuis plusieurs semaines à Niamey alors que je les pressais de les envoyer à Diffa sur le front de la lutte contre Boko Haram ».

« Haute trahison »

Mahamadou Issoufou parle de « haute trahison contre les institutions et contre l'armée ». Cette annonce intervient après l'arrestation de plusieurs hauts gradés en début de semaine.

Le président Issoufou n'a donné ni le nombre ni le nom de ceux qui ont voulu renverser le pouvoir. Il n'a pas donné de nom non plus, mais selon les informations de RFI que le chef de l'Etat n'a pas démenties, parmi les personnes arrêtées figurent un ancien chef d'état-major, le général Salou Souleymane, et le commandant de la base aérienne de Niamey, le colonel Dan Haoua, qui aurait déjà été remplacé, selon des sources concordantes.

Il s'agit ni plus ni moins d'une haute trahison, non seulement contre les institutions civiles de l'Etat, mais aussi contre l'institution militaire elle-même.

Un des auteurs en fuite ?

« Les principaux auteurs de cette folle aventure ont pu être tous identifiés et arrêtés à l'exception d'un seul en fuite. La situation est calme et sous contrôle, l'enquête en cours permettra d'identifier les autres acteurs et complices éventuels de ce funeste complot contre la sûreté de l'Etat », assure le président nigérien.

Mercredi, une source proche de l'affaire avait assuré à RFI qu'il s'agissait du lieutenant Hambali. Mais depuis ce jeudi, l'intéressé dément sur sa page Facebook. Awal Hambali rassure ses amis et assure qu'il n'est ni interpellé, ni en fuite. Il précise qu'il a même pris contact avec le commandant de la gendarmerie pour lui donner sa position. Et qu'il répondra à toute convocation qui lui serait adressé.

Mahamadou Issoufou, élu en 2011, un an après un coup d'Etat, brigue un deuxième mandat à l'élection présidentielle du 21 février 2016.

L'opposition sceptique

A deux mois du scrutin et en plein blocage politique, cette annonce suscite en tout cas des interrogations. On ne sait pas qui serait le commanditaire du coup d'Etat déjoué.

L'opposition se dit d'ailleurs sceptique et rappelle qu'il y a eu des précédents, notamment en 2011 où le président avait annoncé l'arrestation de dix personnes pour tentative de putsch avant de les relâcher, rappelle Ousseini Salatou, un des porte-parole du Front pour la République (FPR), qui regroupe les partis d'opposition et des organisations de la société civile. Il dit donc attendre des preuves pour pouvoir prendre au sérieux cette nouvelle affaire.

« Chaque jour, chaque semaine, il y a un événement, un complot qu'on invente, donc nous sommes habitués. C'est pourquoi, même si ce coup d'Etat est vrai, ça fait sourire les Nigériens, souligne Ousseini Salatou. Les précédents coups d'Etat dont il a parlé, en tout cas, on n'a jamais eu de preuves. Même ceux qui ont été arrêtés ont en fin de compte été blanchis. Donc je suis sceptique, je ne dis pas que c'est vrai ou c'est faux, mais nous nous rendons compte que chaque fois que le régime est en difficulté (...) une situation rocambolesque se créé pour détourner l'attention des Nigériens, pour cacher véritablement le vrai problème. »

Le scepticisme exprimé par Ousseini Salatou est partagé parSeydou Bakary, le président du groupe parlementaire. Il attend des preuves. Pour lui, les autorités cherchent avant tout à détourner l'attention des vrais problèmes du pays.