République centrafricaine : Après un an d'exercice du pouvoir, la justice doit rester une priorité pour le président Touadéra

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République centrafricaine : Après un an d'exercice du pouvoir, la justice doit rester une priorité pour le président Touadéra

Amnesty International, 29 Mar 2017

URL: https://www.amnesty.org/en/documents/afr19/5991/2017/fr/
AI Index: AFR 19/5991/2017
République centrafricaine : Après un an d'exercice du pouvoir, la justice doit rester une priorité
pour le président Touadéra
La justice et la lutte contre l’impunité pour les crimes relevant du droit international doivent
continuer d’être au cœur de l’action gouvernementale menée par le président Faustin Archange
Touadéra, ont déclaré aujourd’hui Amnesty International et 30 organisations de défense des droits
humains en République centrafricaine.
A l’occasion de l’anniversaire de l’accession au pouvoir du président Touadéra, les organisations
rappellent les engagements pris par ce dernier pour rendre justice aux victimes et situer les
responsabilités sur les violations des droits humains et les crimes relevant du droit international qui
ont été massivement perpétrés dans le pays ces dernières années. Ce fut le cas, le 30 mars 2016, lors
de son discours d’investiture lorsqu’il a déclaré qu’il n’y aurait « pas de réconciliation sans la justice
» et que « la justice se ferait».
Malgré un contexte sécuritaire encore fragile, des avancées significatives ont été constatées au
cours de cette première année de présidence. Des progrès effectués dans l’opérationnalisation de la
Cour Pénale Spéciale (CPS) avec notamment la nomination du Procureur spécial en février 2017 et la
tenue de deux sessions criminelles organisées en juin 2015 et août-septembre 2016 ont montré la
volonté politique des autorités centrafricaines pour rétablir la justice.
De même, le président Touadéra a réitéré, récemment devant le Conseil de sécurité des Nations
Unies le 16 mars 2017, que toute initiative de paix en Centrafrique devrait tenir compte des
impératifs de justice tels qu’énoncés par la population dans le cadre des conclusions et
recommandations du Forum de Bangui tenu en mai 2015. Il a rappelé, entre autres, le principe
de « l’impunité zéro », notamment le refus d’immunité ou amnistie pour les personnes qui seraient
responsables de crimes relevant du droit international.
Toutefois, les défis sont encore nombreux pour parvenir à rendre justice aux milliers de victimes. La
reconstruction de l’Etat de droit est un préalable. La question de la protection des civils, la
démobilisation, le désarmement des groupes armés, le renforcement du système judiciaire national
ainsi que le redressement économique et social sont autant de domaines d’action et d’intervention
pour le président et son gouvernement.
Par ailleurs, les organisations signataires rappellent qu’il est urgent de reconstruire le système
judiciaire centrafricain et pallier à ses nombreuses lacunes, notamment l’absence d’instances
judiciaires fonctionnelles sur l’ensemble du territoire, l’insuffisance d’un personnel juridique qualifié,
le manque de matériel et de ressources financières pour la justice, l’absence de mesures de
protection des victimes et des témoins et la faiblesse du système pénitentiaire.
Au regard des défis à relever par le système national et dans l’attente de sa remise sur pied
effective, il importe de renforcer la CPS qui constitue un outil essentiel et stratégique pour garantir
que les auteurs de crimes de droit international et d’autres graves violations des droits humains
soient traduits en justice.
Les organisations signataires relèvent l’importance pour les bailleurs de fonds de concrétiser les
engagements pris dans le cadre de la conférence des donateurs internationaux tenue à Bruxelles en
novembre 2016, et notamment d’assurer la prise en charge complète de l’enveloppe de 105 millions
de dollars requise dans le plan national de reconstruction et de renforcement de la paix pour
renforcer l’appareil judiciaire et rendre opérationnelle la CPS.
Opérationnalisation de la Cour Pénale Spéciale
La nomination, le 15 février 2017, de Toussaint Muntazini Mukimapa de la République Démocratique
du Congo (RDC) comme Procureur spécial de la CPS a marqué un temps fort dans le processus
d’opérationnalisation de ce tribunal hybride. De plus, les avancées dans le suivi de la procédure de
recrutement du Procureur spécial adjoint et des autres membres de la CPS, le recrutement des
magistrats nationaux et internationaux, la création d’un Comité de sélection des Officiers de police
judiciaires, la tenue des sessions de sensibilisation de la société civile et la planification de la
rédaction du règlement de procédure et de preuve, sont autant d’actions qui favorisent la mise en
place effective de ce mécanisme.
Les organisations signataires invitent le gouvernement centrafricain à poursuivre et intensifier les
progrès dans le recrutement des juges nationaux et internationaux et des autres membres du
personnel de la CPS et s’assurer que ce processus soit indépendant, transparent et basé sur le
mérite.
De plus, les partenaires internationaux de la République centrafricaine doivent assurer un
financement durable à même de garantir le bon fonctionnement de cette juridiction, ont conclu les
organisations signataires. Cet appui doit également se traduire par la nomination de juges et de
personnels judiciaires qualifiés pour les recrutements en cours ou à venir ainsi qu’un soutien
politique à l’institution.
Coopération avec la Cour Pénale Internationale
Les organisations signataires rappellent que la lutte contre l’impunité des crimes graves commis en
République centrafricaine passe également par une coopération pleine et entière des autorités avec
la Cour Pénale Internationale (CPI). La CPI avait été saisie en 2014 par l’État centrafricain et est
complémentaire de la CPS et du système judiciaire national.
Organisations signataires
- Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture et la Peine de Mort (ACAT-RCA)
- Amnesty International (AI)
- Association des Femmes Juristes de Centrafrique (AFJC)
- Association des Femmes Musulmanes Activistes pour le Développement (AFMAD)
- Association des Victimes de la LRA en Centrafrique (AVLRAC)
- Association des Victimes des Évènements du 29 Octobre 2015 et Suivants
- Association pour la Défense, le Rétablissement et le Développement des Droits Humains
(ADRDH)
- Avocats Sans Frontières RCA (ASF/RCA)
- Bureau d’Information sur les Droits de l’Homme (BIDH)
- Centre pour l’Information Environnementale et le Développement Durable (CIEDD)
- Civisme et Démocratie (CIDEM)
- Coalition Centrafricaine pour la CPI (CCCPI-RCA)
- Comité National pour la Prévention du Crime de Génocide (CNPCG)
- Commission Episcopale Justice et Paix (CEJP)
- Coordination des Organisations Musulmanes de Centrafrique (COMUC)
- Enfants Sans Frontières (ESF)
- Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH)
- Femmes Action et Développement en Centrafrique (FADEC)
- Femmes, Hommes, Action Plus (FHAP)
- Leadership en Centrafrique (Lead Centrafrique)
- Ligue Centrafricaine des Droits de l’Homme (LCDH)
- Mouvement de Droits de l’Homme et l’Action Humanitaire (MDDH)
- Observatoire Centrafricain des Droits de l’Homme (OCDH)
- Observatoire pour les Elections et l’Etat de Droit (OPED)
- Organisation des Femmes Musulmanes de Centrafrique (OFMCA)
- Planète Femmes Centrafrique (PFC)
- Plateforme de la Société Civile en République Centrafricaine (SCRCA)
- Réseau Centrafricain des Organisations pour la Promotion et la Défense des Droits de
l'Homme (RONGDH)
- Réseau National des Organisations de Jeunes pour les Droits de l’Homme (RNOJDH)
- VITALITE PLUS
- Women Act for Living Together (WALT)